L'Homme Invisible se terrait derrière un arbre. La peur au ventre, il cherchait à quitter sa cachette avant d'être rattrapé et, sans aucun doute, taillé en pièces comme les autres.
A quelques pas, le Père Noël gisait dans une mare de sang. Le rouge du manteau atténuait à peine l'horreur de son éviscération.
Depuis le matin, quasiment toutes les créatures non-humaines avaient été décimées. Un lourd tribut avait été payé par Marvel dès le commencement: Batman écrasé sur un immeuble, Spiderman étranglé par un de ses fils de soie et jusqu'à Superman, noyé avec un parpaing en kryptonite attaché au cou.
Après les super-héros, on avait retrouvé les autres : la Fée Clochette écrabouillée entre les pages d'un dictionnaire, les 101 dalmatiens transformés en autant de descentes de lit et même l'inoffensif Edward-aux-mains-d'argents, empalé sur l’une de ses propres mains.
Alors qu'il se morfondait chez lui en se demandant quand son tour viendrait, l'Homme Invisible avait senti une présence indéfinissable mais malsaine. Sans prendre le temps de réfléchir, il avait bondi en dehors de la pièce et déboulé à toute vitesse dans la rue. Ne sachant où aller ensuite, il avait bêtement traversé pour trouver refuge derrière un arbre. Reprenant son souffle, il se rendit compte de la précarité de sa situation: se planquer derrière un platane était vraiment une idée débile. La "chose" capable de tous ces assassinats sordides n'allait sans doute pas se laisser berner par une ruse aussi mince.
Alors qu'il essayait de se faire tout petit, il entendit un chuchotement à son oreille, tandis qu'une écoeurante puanteur envahissait ses narines et ses poumons. La voix se fit insistante et l'Homme Invisible pu distinguer : " Je ne vous supporte pas, vous autres calopites dégénérés! Tu vas crever comme les autres!".
L'Homme Invisible ne fut jamais retrouvé, et pour cause: son corps tomba dans un ruisseau où il se décomposa sans jamais être remarqué.
Privé de toutes les créatures merveilleuses qui faisaient sa joie, l'humanité commença à s'étioler dans la tristesse et le désespoir. Environ deux siècles plus tard, les derniers groupes d'humains se suicidaient collectivement.
Mille ans après, le Diable – parce que c’était lui – se rendit compte d'une erreur de planète. Les calopites habitent Delta du Centaure et non Gamma du Soleil. Ce sont d'abominables prédateurs en sécession de la Confédération des Mauvais Esprits, qui n'ont absolument rien à voir avec les créateures plutôt sympathiques supprimées un peu trop légèrement.
"Tant pis pour eux", fut la seule oraison qui vint à l'esprit du Diable, alors qu'il consultait les horaires intergalactiques pour se rendre sur Delta du Centaure.